Le Nigeria désormais première économie africaine devant l’Afrique du sud
Pays le plus peuplé d’Afrique et premier producteur de pétrole africain, le Nigeria est devenu dimanche la première économie du continent grâce à un changement de calcul statistique, passant devant l’Afrique du Sud.
Le PIB (produit intérieur brut) du Nigeria en 2013 s’élève désormais à 510 milliards de dollars, a annoncé le chef du Bureau national des statistiques, Yemi Kale. En 2012, le PIB du pays était de 453,9 milliards de dollars, selon cette même méthode, alors qu’il était de 384 milliards de dollars pour l’Afrique du Sud la même année.
«Le Nigéria est devenu la plus grande économie en Afrique en terme de PIB et devient la 26e plus grande économie dans le monde», a souligné la ministre des Finances Ngozi Okonjo-Iweala. « Sur la base du revenu par tête, le Nigeria arrive en 121e position dans le classement mondial», a-t-elle ajouté.
Des statisticiens des Nations unies recommandent aux pays de modifier tous les cinq ans le mode de calcul de leur produit intérieur brut pour prendre en compte les évolutions dans la production et la consommation, mais le Nigeria n’avait pas modifié sa méthode de calcul depuis 1990.
Les nouveaux chiffres, qui prennent en compte l’apparition et le développement rapide de nouveaux secteurs et de nouvelles industries, notamment les télécommunications et l’industrie locale du cinéma, Nollywood, donnent aux investisseurs étrangers une vision plus réaliste de l’économie du pays. Mais, selon les experts, ces chiffres ne doivent pas être interprétés comme un signe de développement, l’Afrique du Sud étant largement devant le Nigeria en termes de PIB par habitant, d’infrastructures et de gouvernance.
Si une petite partie de la population est extrêmement riche, la grande majorité des quelques 170 millions de Nigérians vit avec moins de deux dollars par jour, dans un pays –le plus peuplé d’Afrique –qui manque cruellement d’infrastructures, où tous n’ont pas accès à l’eau potable, où les coupures d’électricité sont quotidiennes et la corruption endémique.
Pour Dawie Rodt, de l’Efficient Group, basé en Afrique du Sud, «en termes d’infrastructures et de systèmes de gestion l’Afrique du Sud reste un géant, loin devant le Nigeria». Selon Mme Okonjo-Iweala, le PIB par tête au Nigeria est désormais de 2.688 dollars pour 1.555 dollars en 2012. Mais celui de l’Afrique du sud est beaucoup plus élevé à 7.508 dollars.
Le changement de méthode de calcul «est plus cosmétique qu’autre chose. Mais nous pensons que cela va augmenter les opportunités d’investissement au Nigeria», a estimé de son côté Chuba Ezekwesili, un économiste du centre de recherche Nigeria Economic Summit.
Nollywood et téléphonie mobile
Le Nigeria, principal producteur et exportateur de pétrole africain, a enregistré de forts taux de croissance ces dernières années, devenant de plus en plus attractif pour les investissements des entreprises étrangères, malgré la corruption rampante, les problèmes de vol de pétrole à grande échelle et l’insurrection islamiste qui sévit dans le Nord.
Le taux de croissance annuel a atteint en moyenne 6,8% entre 2005 et 2013 et les prévisions de croissance pour cette année sont de 7,4%, selon les chiffres du Fonds monétaire international (FMI). En comparaison, l’Afrique du Sud a connu un taux de croissance légèrement supérieur à 5% entre 2005 et 2008-9, et peine depuis à dépasser les 3,5%. Les télécoms et l’industrie du cinéma comptent parmi les secteurs qui ont le plus évolué au Nigeria depuis 1990.
A cette époque, le Nigeria comptait peu de lignes de téléphone fixe alors qu’aujourd’hui, il s’agit du plus important marché de téléphonie mobile d’Afrique, avec environ 167 millions de lignes en service selon la commission nigériane des communications. La très prolifique industrie du film de Nollywood génère quant à elle jusqu’à 590 millions de dollars de chiffre d’affaires annuel, selon Robert Orya, à la tête de la banque nigériane de l’import-export.
’Effet psychologique’
Certains experts, comme Roelof Horne, de l’Investec Asset Management, attendent de cette révision un «effet psychologique» sur la perception du continent africain par les étrangers. Mais pour Bismarck Rewane, directeur de la firme Financial Derivatives Company basée à Lagos, la révision du PIB ne peut être significative «que si elle a un impact positif sur le niveau de vie des gens».
«Les Nigérians paieront toujours l’essence le même prix, ils auront toujours le même argent dans leurs poches et la distribution d’électricité ne va pas changer lundi matin», rappelle-t-il.«Du coup, l’exercice ressemble plutôt à un voyage de la réalité vers la vanité», assène-t-il.(Afp)